Le traitement de lalcoolisme à travers lhistoire.
Au XIX°
siècle la France a 40 ans de retard sur les autres pays dans sa perception de lalcoolisme. La conscience médicale est marquée par la théorie de lhérédité et de la dégénérescence.En 1852
cest lutilisation du terme ALCOOLISME par Magnus Huss pour désigner les troubles engendrés par l'abus d'alcool.Ce nest quà partir davril 1894 que sont crée les premiers quartiers spéciaux pour les buveurs dans les services asilaires. 500 lits pour homme voient le jour dans deux asiles. Ce fait est nouveau en France, mais à létranger de nombreux établissements de soins pour alcooliques existent déjà. On commence alors à parler des alcooliques et de leur traitement.
On doit à un suédois le concept nouveau dalcoholismus chronicus. Il insiste sur la dipsomanie et la oinomanie. "Cest toute la différence qui sépare un vice dune maladie "
En France et dans les pays latins viticoles la consommation usuelle de vin est considérée comme normale. Lalcoolisation est sans connotation psychiatrique. On ne parle pas encore de dépendance ni ne maladie alcoolique. On parle plutôt de "funestes habitudes " ou de "passion de boire " La théorie de la dégénérescence dont la consommation dalcool est la cause est très répandue. " Les buveurs créent des dégénérés et les dégénérés créent des buveurs ". Il nétait donc pas possible de guérir les "tendances dépravées des buveurs dalcool ". Le vieux dicton : " qui a bu boira " date de cette époque !
Ce n'est qu'en 1819 que Rayer découvrit l'origine permanente du Delirium Tremens.
En 1850 on soigne au rhodanate de potassium, afin dobtenir un effet répulsif à lalcool.
En 1853 la thèse de REBER parle brièvement du traitement du Delirium Tremens par lopium.
Trois facteurs allaient en 1894 favoriser la création dasile pour alcooliques.
1/ Un discret courant parlait dune possible thérapeutique curative de lalcoolisme chronique.
2/ Les hospitalisations pour aliénation mentale dorigine alcoolique progresse, surtout après la guerre de 1870. On saperçoit que les aliénations augmentent en même temps que la production et la consommation dalcool. En 1898, ¼ des admissions sont dues à lalcool.
3/ "De lasile au cabaret " La loi de 1838 ne permet pas de garder les internés pour délire à la disparition de celui-ci. Donc une fois dehors lintoxication reprend. En 1885 LANCEREAUX demande la création de maison de refuge pour ceux qui ne peuvent éviter labus des liqueurs fortes.
En 1895, cest à la suite du rapport de messieurs MAGNAN et LEGAIN que lAssistance Publique encourage la création de quartier pour les aliénés alcooliques. Le traitement qui leur est appliqué à de quoi étonner aujourd'hui, MAGNAN rappelle que " ils boivent dabord la ration de vin qui fait partie du régime commun puis la ration supplémentaire accordée aux travailleurs "
La prise de conscience de la nécessité de labstinence absolue pour permettre des résultats commence à sentendre. Les alcooliques ne sont plus "des déséquilibrés héréditaires ou de psychopathes constitutionnels. " Les guérisons apparaissent après 6 à 18 mois dhospitalisation.
Cest dans les institutions religieuses que labstinence pour tous est de rigueur et que les résultats sont les meilleurs. On attribut alors aux seuls exercices religieux la " guérison " et non à labstinence totale dalcool.
Il faut attendre 1898 pour que lidée dalcoolo dépendance se généralise. On parle alors daccoutumance à des produits toxiques et du besoin irrésistible den user. Il sagit de "lalcoolisme latent "
On soigne avec des thérapeutiques diversifiées : La teinture de noix vomique et la strychnine. Bain de bouche faradique. Un traitement moral sur les dangers de lalcool ou des "exercices religieux ".
Lidée que pour guérir, il fallait une abstinence à vie commence à poindre.
La notion de traitement psychique commence à apparaître, le concept de labstinence forcée, est remplacé par le concept de convertis à labstinence. On nutilise la suggestion, notamment la suggestion hypnotique.
En 1900 apparaissent les premiers "dispensaires antialcooliques et dhygiène "
Les mouvements néphalistes ouvrent des lieux de consultations distinctes des consultations des hôpitaux psychiatriques, pour éviter largument "on me prend pour un fou ".
La lutte contre l'alcoolisme à la fin du siècle dernier a pris naissance dans la morale sociale sous le couvert de l'hygiène publique. Les frères PELLOUTIER (1900 la vie ouvrière en France) séparent les pratiques sociales et individuelles.
L'alcoolisme est propre à notre époque, il est lié à la misère, à l'excès de travail, à la mauvaise qualité des alcools, c'est celui des ouvriers.
L'ivrognerie est de tous les temps, de tous les pays, de toutes les classes.
Ce sont les initiatives privées qui créèrent les premières structures réservées aux malades alcooliques.
Deux centres de postcure qui ont une vision moraliste des soins, ouvrent en France.
La guerre 1914/1918 à eu deux conséquences :
- La disparition de la motivation des mouvements antialcoolique, à savoir la crainte davoir des soldats dégénérés par lalcool, incapable de reprendre lAlsace et la Lorraine.
- et lapologie du "bienfait du gros rouge " qui à permis aux poilus de tenir dans les tranché. Voir "lhommage au vin " du général en chef des armées françaises de 1918.
1918
Cest lapparition des sociétés de " patronage " et des "sociétés de tempérance ".En 1922 est inauguré, dans le cadre de lhôpital psychiatrique de St. Anne le premier service ouvert. Les malades peuvent franchir dans des conditions de sécurités suffisantes la période si dangereuse de laccès hallucinatoire toxique.
En 1934 commence les premières cures à lapomorphine dites "cure de dégoût ". Lapomorphine est un sédatif de lanxiété, ce grand facteur de lalcoolisme, on pensait que son action pouvait supprimer le besoin dalcool sans nausée et vomissement, rien que par son action pharmacodynamique.
En 1936 souvre de tel service dans tous les H.P.
Au niveau législatif les soins aux malades alcooliques dépendaient de la loi du 30 juin 1938, relative aux aliénés. Cette loi restera en vigueur jusquà son remplacement par la loi du 27 juin 1990. " Lhôpital ne veut pas de lui, lasile ne peut le recevoir, il est condamné à sintoxiquer encore ".
1939
Lalcool intraveineux est utilisé dans le sevrage et dans les états alcooliques délirants ;Il fut employé couramment sous forme de soluté glucosé hépatisé.
1940
on utilise lémétine comme vomitifEn 1948 est créer le disulfirame qui semble-til ouvre la voix à un traitement ambulatoire de lalcoolisme. Ce produit, associé à lalcool, bloque laldéhyde déshydrogénasse en entraînant des sensations de malaise avec impression de chaleur, céphalée, gène respiratoire, rougeur de la face, hyperthermie des conjonctions, accélération du pouls et chute de tension.
Dans les "cures de dissuasions " après prise du produit le malade consomme de lalcool pour provoquer une D.E.R. (Disulfirame Ethanol Réaction) ou effet antabuse. Lépreuve et répétée avec des délais variables dans la semaine.
Dans "le traitement dinterdiction " le disulfirame est donné en dose modérée et de façon prolongée pour aider au maintient de labstinence
Suite à cette découverte létat décide en 1955 que les dispensaires dhygiène mentale sont chargés du dépistage, du traitement et de la postcure des malades alcooliques. Ces centres sont deviendront les CMP en 1986
1950
DUCHENE réclame lexistence de services pour alcooliques dans les hôpitaux généraux. Ceci fut entériné en 1978.La loi du 15 avril 1954 précise que les alcooliques dangereux doivent être placés sous la surveillance de lautorité sanitaire. Elle prévoit dautre part la création de centres de soins spécialisés et laménagement de sections spéciales auprès des hôpitaux pour la désintoxication et la rééducation des alcooliques.
1955
cest lapparition à Saint-Cloud du traitement avec psychothérapie et notamment psychothérapie de groupe, ainsi que le travail avec les mouvements danciens buveurs.En 1960 sest la politique de la sectorisation. Des malades peuvent aboutir dans des services ou l'on ne sintéresse pas obligatoirement de la maladie alcoolique.
En 1965 apparaît le traitement au sulfate de magnésie hypertonique appelée couramment "les chauffantes " qui retrace bien leffet ressenti.
Ces piqûres chauffantes sont sans conteste un excellent support psychothérapeutique, mais il y à aussi nombre dargument en faveur dune action favorable de cette thérapeutique sur les mécanismes biochimiques de lalcoolo-dépendance.
Cette technique contribua considérablement au développement de cure ambulatoire.
On voit apparaître des cures avec une aide psychothérapeutique en cas dabstinence mal vécue.
La postcure est basée sur trois piliers
La cure mal dénommé de "désintoxication " laisse croire à la restitution dun équilibre dans un délai cour (1 mois) alors que le travail de postcure est la phase la plus importante, cest à dire lapprentissage de la vie quotidienne hors alcool.
En 1970 apparaissent les Consultations dHygiène Alimentaire (C.H.A.). Il faut donner une importance particulière au traitement des maladies de la nutrition, la maladie alcoolique étant le principal mais non le seul objet des consultations. Le terme "hygiène alimentaire permettait de prendre en charge des malades qui refusent dattribuer à une consommation excessive de boisson alcoolisée les troubles ressentis.
Les malades nont plus à aller à lH.P.
En 1971 le traitement au disulfirame, outre son effet biologique, est un support à létablissement dune relation psychothérapeutique. Les établissements, avec des variantes proposent :
Les foyers de postcure commence à sintéresser à la réinsertion par le travail de lalcoolo dépendant désocialisé.
La circulaire du 14 mars 1972 prévoie que "le psychiatre soit impliqué dans la lutte contre lalcoolisme ".
(Circ. DGS/1581/MS 1 28-09-72 : Application de la loi n° 70-597 taux légal d'alcoolémie dépistage dans l'air expiré )
La circulaire DGS/1312/MS du 16-07-1973 reconnaît lalcoolisme chronique comme une Maladie
En 1975 les C.H.A deviennent des Centres d'Hygiène Alimentaire (Circ. Veil)
Cest la généralisation en 1978 dunité dalcoologie en hôpital général par la prise de conscience par les médecins de l'alcoolo-dépendance. (Circulaire DENOIX DGS/454/MS2 28-06-78) Après les soins de gastro-hépato le patient avait une amélioration de son état somatique mais avec une reprise immédiate de lalcoolisation dés la sortie.
Traitement à la sérotonine, thérapeutique de lacamprosate.
En 1983 apparaissent des traitements non standardisé de lalcoolique. On soriente vers un accompagnement personnalisé du malade dans toute sa globalité. Le 15 mars 1983 par la circulaire RALITE les C.H.A.deviennent des C.H.A.A : Centre d'Hygiène Alimentaire et d'Alcoologie
Dans les structures on utilise de plus en plus de méthode :
Psychothérapie individuelle.
Dynamique de groupe.
Ergothérapie
Technique de relaxation.
Le patient vient se soigner et non plus se faire soigner. Lintérêt dune thérapie de groupe associé à des entretiens individuels se généralise.
La post cure nest pas un temps de repos, mais un temps dynamique. Cest pendant celle ci que se fait lessentiel du travail qui est celui du décryptage des conflits interne
La théorie de FOUQUET selon laquelle "il y a alcoolisme lorsquun individu a en fait perdu la liberté de sabstenir de boire " est prédominante. Trois facteurs apparaissent :
Le facteur psychique
Le facteur de tolérance
Le facteur toxique.
Une discipline nouvelle apparaît ; lalcoologie. Elle est capable dintégrer les différentes données biologiques, psychologiques, sociologiques, économiques dans une vision globale des problèmes dalcool.
Diverses formes daction psychothérapeutique voient le jour, suivant les différents courants psychothérapiques. La plus en vogue est lapproche systémique
Les techniques aversives médicamenteuses à lapomorphine tombent en désuétudes. " Elles se situaient dans unes sorte de daccord sadomasochiste entre soigné et soignant avec désir dêtre punis est désir de punir "
Les thérapeutiques médicamenteuses noccupent plus le devant de la scène tout en restant utilisées. (Sulfate de magnésie hypertonique intraveineux, antidépresseur, tranquillisant, lacamprosate)
La sociale thérapie selon lexpression de Brion est au premier plan du traitement.
La valorisation des mouvements danciens buveurs est acquise.
Actuellement le traitement de lalcoolo-dépendance se situe dans un processus daccompagnement et non plus de prise en charge.
(Décret 11/07/94 : taux légal d'alcoolémie 0,70 g/l Décret 15/09/95 : taux légal dalcoolémie 0,50 g/l )
Résumé : Aliénation Mythe de la cure Cure de désintoxication en milieu psychiatrique. 1975 |
Retour
au sommaire .
Modifié le
mercredi 15 décembre 2010